Compte-rendu de la cérémonie de remise de la médaille des Justes au Pasteur Pierre Gagnier et son épouse Hélène
18 janvier 2012
Discours d'Andrée Karsenti (Présidente de l'Association "Les Enfants et Amis Abadi")
Madame la Maire,
Madame la députée,
Mesdames, Messieurs les élus,
Chers amis,
Soixante dix ans après une des périodes les plus tragiques de notre histoire, notre mémoire demeure vigilante. Nous rendons aujourd'hui hommage à ces hommes et ces femmes d'honneur qui nous ont simplement permis de vivre, nous les enfants cachés et sauvés, et dont le seul crime était d'être nés juifs. La mémoire d'un couple nous parvient : le Pasteur Pierre Gagnier et son épouse Hélène. Pierre Gagnier est le Pasteur de l’Église Réformée de France, Boulevard Dubouchage à Nice en septembre1943, et comme Monseigneur Rémond, évêque de Nice, comme le Pasteur Evrard sa femme et ses fils, ils répondent à la demande d'aide du Réseau Marcel crée par Moussa Abadi et sa compagne Odette Rosenstock dans le but de sauver des enfants juifs. Bel exemple d'œcuménisme : des juifs sollicitant un évêque et des pasteurs, non seulement dans leur foi mais aussi dans leur Humanité.
Pendant ces années d’occupation, le Pasteur Gagnier, homme de courage, en accord avec ses convictions et le soutien sans faille de son épouse, n’hésite pas à cacher des juifs dans le presbytère et dans le temple. Le presbytère devient une annexe de faux papiers. Pierre Gagnier est lui-même très actif dans la confection de cartes d'identité, de cartes d'alimentation, dans la fourniture de vivres, d'argent, de faux certificats de baptême, de complicité d'évasion, de lieux de "cache". Il sollicite les familles de la paroisse pour accueillir des enfants et les intègre au mouvement des Éclaireurs et des Routiers pour les plus âgés.
Odette et Moussa n’ont pas le titre de Justes parmi les Nations car juifs, mais grâce à Madame Blumenthal, ils ont un square nommé à leurs noms, à deux pas de cette Mairie, à la jonction de la coulée verte où se forme un triangle, entre l’Avenue Daumesnil recevant sur son côté gauche la chute des rues Montgallet et de la rue de Charenton.
Monseigneur Rémond, le Pasteur Evrard, sa femme Ida et ses fils, Joseph, Jean, Edmond, Louis et Daniel ont tous étés reconnus Justes, mais le Pasteur Gagnier et sa femme Hélène n’ont pas voulu recevoir cette distinction. Pierre Gagnier a explicité cette déclaration à Nice, le 18 mai 1945 : « Je trouve que nous autres, Chrétiens, ne devons rien raconter de ce que Dieu nous permit de faire pour nos prochains en détresse. C'était une faveur pour nous de pouvoir agir et lutter contre cette force antichrétienne que fut le racisme allemand .
J’ai rencontré Jean-Marc et Françoise Gagnier grâce à leur fille Sabine. J’ai entendu parler des parents de Jean-Marc, de leurs engagements dans la vie. Pierre Gagnier était profondément dévoué à sa vocation de Pasteur, impliqué dans l’Église dont il refusait la sclérose, se voulait en accord avec son temps. L’œcuménisme, en particulier était l’un de ses sujets de préoccupation … mais en ce qui concerne ses actes de résistance, rien, il n'avait rien raconté !
Nous, « Enfants Abadi », avons créé une association dont le but est de réunir les amis et les enfants cachés par Odette et Moussa Abadi afin de préserver et perpétuer leur mémoire, et plus généralement de préserver et perpétuer la mémoire de la Shoah. Dans notre désir d'évoquer Odette et Moussa, de faire connaître leurs actions, nous ne pouvions pas les séparer de ceux qui leur ont tendu la main et sans qui rien n'eut été possible. Des enfants, des rescapés dont certains témoignent aujourd'hui, doivent la vie au courage, à la détermination de Pierre et d'Hélène Gagnier. Aau nom des membres de notre Association, en mon nom propre et avec toute l'amitié qui me lie à Jean-Marc et à Françoise je veux dire l'émotion qui est nôtre, qui est mienne.
Merci à Madame Blumenthal de toujours être présente dans nos demandes, merci à l'équipe Municipale.
Andrée Poch-Karsenti