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Exposition "Les enfants cachés" à la bibliothèque de Saint Martin d'Auxigny (18)

6 novembre 2009

Les prémices de la Shoah

Le 30 janvier 1933 : Adolf Hitler est désigné comme chancelier par le maréchal Von Hindenburg. Les Nazis cherchent à créer une Allemagne « Judenrein » (nettoyée des Juifs), en rendant la vie impossible aux 600 000 Juifs allemands au point de contraindre une partie d'entre eux à l'exil.

Le 15 septembre 1935 : promulgation des Lois de Nuremberg (boycott des commerces, suppression des droits civils et sociaux, exclusion de certaines professions, interdiction de fréquenter l'école, etc). Hitler justifie ces lois en assurant qu'elles devraient stabiliser les relations entre «Juifs» et «Aryens»...

La Nuit de Cristal

Ce nom est donné au violent pogrom qui a lieu les 9 et 10 novembre 1938 dans toute l'Allemagne et sur les territoires récemment annexés (Autriche et Sudètes). Elle est présentée comme une explosion spontanée de colère populaire et comme une prétendue réponse à l'assassinat du diplomate Ernst Von Rath, perpétré à Paris, le 7 novembre 1938, par Herschel Grynszpan, un juif polonais âgé de 17 ans. Elle est aussi la première vague d'arrestations, 20 000 à 30 000 Juifs sont arrêtés et déportés dans les camps de concentration existants (Dachau, Sachsenhausen).

Suite aux exactions antisémites, plus de 10 000 enfants partent vers l'Angleterre, la Belgique, la Hollande,la France...

Octobre 1940 : premiers internements d'enfants juifs en France (Gurs...)

Le 20 janvier 1942 : mise au point de la solution finale par la conférence de Wansee, à Berlin, dont l'objectif est l'extermination des Juifs d'Europe.

La conférence d'Evian : Que faire des Juifs en 1938 ?

Sur l'initiative du Président des Etats-Unis d'Amérique, Franklin D Roosevelt, qui réagit à une pression politique grandissante, se déroule la Conférence d'Evian, du 6 au 13 juillet 1938, dont le but est de statuer sur le sort des réfugiés juifs (allemands et autrichiens).

La réunion se solde par un échec, malgré la création du Comité Intergouvernemental aux Réfugiés (ICR).

Très ironiquement, le gouvernement allemand déclare : « Il est étonnant que les pays étrangers critiquent l'Allemagne pour le traitement imposé aux Juifs, alors qu'aucun d'entre eux n'accepte de leur ouvrir ses portes ». Par la suite les violents pogroms de la Nuit de Cristal, ne changent rien à la position des Américains qui restent peu enclins à accueillir des réfugiés juifs.

La persécution des Juifs peut commencer.

Repères géographiques en France

Institué par la convention d’armistice franco-allemande signée le 22 juin 1940 à Rethondes, le découpage du territoire français intervient dès le 25 juin suivant. Au terme de ce découpage, se trouvent :

De l'exclusion à la déportation : le sort des enfants juifs s'aggrave

Les rafles de 1941 de Juifs étrangers (par convocation « du billet vert » et raffles dans les arrondissements de Paris).

Le 8 juin 1942 : port de l'étoile jaune, mesure discriminatoire à laquelle n'échappent pas les enfants dès l'âge de six ans . Elle n'est pas imposée en zone sud.

Les 16 et 17 juillet 1942 : la rafle du Vel d'hiv, à Paris, contre les Juifs étrangers par la police française. Pour la première fois sont arrêtés des femmes (5802) et des enfants (4051). Les enfants sont arrachés à leurs mères (déportées) puis abandonnés dans des camps avant d'être déportés à Auschwitz. Aucun ne reviendra.

Le 26 août 1942 : le gouvernement de Vichy, par l'intermédiaire de la milice française, livre à la gestapo, 10 000 Juifs étrangers (dits apatrides) qui se trouvent en zone non-occupée. Il livre tout d’abord les Juifs internés dans les camps français, puis ceux qui avaient été incorporés dans les Groupements de travailleurs étrangers. Il n'est pas question pour Vichy de garder des enfants juifs, en France.

Mise en place des premiers réseaux juifs de sauvetage

L'opinion publique bascule, des chaines de solidarité s'intensifient.

Les premières organisations qui aident les enfants sont l'EIF, l'OSE et le Comité Amelot . Elles agissent souvent sous le paravent de l'UGIF. L'UGIF (0Union Générale des Israélites de France) est un organisme créé par une loi française du 29 novembre 1941 à la demande de l'armée allemande. Sa mission première est d'assurer la représentation des Juifs auprès des pouvoirs publics. Tous les Juifs de France sont tenus d'y adhérer. De nombreuses associations juives sont dissoutes.

Les Eclaireurs Israélites de France : (EIF)

Groupement de scouts juifs, leur fondateur est Robert Gamzon (Castor). En septembre 1942, création de la « sixième », organisation clandestine de sécurité, d'auto défense, de planquage
et de fabrication de faux papiers. Cette section sauve des jeunes Juifs.

L' Oeuvre de Secours aux Enfants : (OSE)

Créée en Russie en 1912, elle s'installe à Berlin en 1923 (Albert Einstein en est le président), puis à Paris en 1933.

Dès février 1941 : 5000 enfants de Juifs étrangers sont internés dans les camps de la zone sud, en particulier à Rivesaltes et Gurs.

Les premières libérations d'enfants interviennent au mois d’avril 1941. Andrée Salomon organise le service qui permet de sortir les enfants des camps. Vivette Samuel, assistante sociale volontaire, intervient à l'intérieur des camps, Sabine Zlatin intervient de l'extérieur. A partir de 1942 : les enfants ne sont plus en sécurité dans les maisons de l'OSE, celles-ci risquent de devenir des pièges.

Le mot d'ordre est « Sauvons les enfants et dispersons les »

Au sein de l'OSE, le Circuit Garel :

Dès août 1942 : le Docteur Joseph Weil persuade Georges Garel (résistant lyonnais) de mettre sur pied un réseau clandestin pour les enfants déportables. Le réseau Garel est opérationnel au début 1943 dans la région de Toulouse. Chaque région comporte un responsable qui maintient la liaison entre le PC central et les départements.

En règle générale, les enfants sont évacués des maisons après avoir changé d'identité. Ils sont alors confiés à des équipes départementales, cloisonnées. L'arrestation d'Alain Mossé (ancien chef de cabinet du préfet de Savoie), oblige l'OSE à plonger dans la clandestinité en mars 1944. Le drame d'Izieu intervient un mois après.

Le sauvetage des enfants juifs par l'OSE est un des volets les plus importants de la Résistance juive contre le gouvernement de Vichy et l'occupation allemande.

Le Comité Amelot

Ses débuts : la Colonie Scolaire située au 36 de la rue Amelot à Paris, est fondée en 1926 par David Rapoport et Juda Jacoubovitch.

Elle a pour mission la création d'écoles complémentaires pour les familles des Juifs immigrés. En 1930, elle crée un service médical qui dispense des consultations gratuites et devient, en 1933, le dispensaire « La mère et l'enfant ». Durant l'Occupation : les responsables de divers courants de la Fédération des Sociétés Juives de France (FSJF) décident d'unir leurs efforts pour secourir les Juifs émigrés et créent un comité dont le siège est fixé dans les locaux de la "Colonie scolaire" au 36 de la rue Amelot, à Paris, d'où son nom de "Comité Amelot".

En septembre 1940 : David Rapoport rejoint le comité. Il en devient très vite la cheville ouvrière. Par prudence, il exige que la direction du comité reste ignorée du public et des autorités. C'est ainsi que, sous l'étiquette de la Colonie scolaire et de son dispensaire, « La Mère et l'Enfant », le Comité Amelot fonctionne au grand jour et peut couvrir une activité clandestine. Ce service est le principal recours pour les Juifs émigrés au début des persécutions.

A la fin de l'année 1942 : un certain nombre de dirigeants du Comité sont arrêtés, puis déportés dont David Rapoport qui meurt d'épuisement à Buna-Monowitz le 2 juillet 1944.

Le réseau Marcel

Le réseau Marcel est créé début 1943 par Moussa Abbadi et Odette Rosenstock. Tous deux rejoignent la Résistance à Nice et y trouvent la cause pour laquelle ils vont risquer leur vie : le sauvetage des enfants .

En septembre 1943, après l'armistice entre l'Italie et les Alliés, les Allemands envahissent les Alpes-Maritimes et les Juifs sont pris au piège. Moussa Abadi convainc Monseigneur Rémond (Evêque de Nice) de l'aider à sauver les enfants juifs. Ce dernier ouvre les pensionnats catholiques du diocèse et nomme Moussa Abbadi, inspecteur de l'enseignement catholique du diocèse de Nice et Odette Rosenstock, assistante sociale.

Moussa Abbadi, sous le nom de Monsieur Marcel, devient un spécialiste des "fausses vraies cartes d'identité" et des "fausses vraies cartes d'alimentation" : il en fabrique plus de mille. Le réseau Marcel sauve la vie de 527 enfants.

D'autres réseaux de sauvetage

Le sauvetage des enfants

En zone occupée : C'est la fuite

Les parents cachent leurs enfants avec eux ou seuls, selon leurs moyens ou leurs relations, sur place, en province ou en zone libre. Simultanément, des associations juives, catholiques, protestantes ou laïques participent au sauvetage.

En zone libre

Les enfants sont accueillis dans des maisons d'enfants déjà existantes qui leur servent de refuge à leur sortie des camps. Des institutions religieuses protestantes ou catholiques participent à cet accueil, ainsi que des particuliers (paysans, familles d'accueil,
nourrices...).

De nouveaux réseaux de sauvetage se créent. Des fuites à l'étranger sont organisées. Certains enfants sont déstabilisés par les changements d'identités, de pratique religieuse, de lieux d'une cache à l'autre. Plusieurs personnes ayant participé au sauvetage des enfants, sont arrêtées, internées, déportées.

Destins d'enfants

A Sagonne (Cher), le petit Charles Bagès, est recueilli par le forgeron Danneman, et scolarisé au milieu des jeunes Français, alors que ses parents ont été raflés à Paris et déportés.

A Sury-près-Léré (Cher), Régine Hodara, née le 27 mars 1936, est confiée à Hermine Lasne. Sa maman a été arrêtée. Elle est baptisée et scolarisée à l'école du village.

Près de Saint Amand (Cher), Richard Rein, né à Orléans, le 31 mai 1941, est caché dans un abattoir. Sans doute par ses parents qui font partie du Mouvement Combat.

A Nice ( Alpes-Maritimes), après l'entrée des Allemands en septembre 1943, la famille Szteinsznaider est dispersée : les parents, d'un côté, leurs quatre enfants pris en charge par le Réseau Marcel. Joseph Szteinsznaider, né à Paris, le 26 février 1937 devenu Joseph Garnier est caché dans un couvent, puis chez des paysans, enfin dans un préventorium à Grasse.

Lazare Szteinsznaider, né en 1927, à Paris (devenu Enault) est placé à l'Institut Don Bosco, à Nice, puis à Séranon, où il est arrêté sur dénonciation, puis déporté (convoi 73). Il décède le 20 mai 1944 à Kaunas (Lithuanie).

Après la libération : L'OSE prend en charge Eva Szteinsznaider (cachée à Chambéry), Dolly (placée au pensionnat des Clarisses) et Joseph. Les trois enfants deviennent Pupilles de la Nation.

Les Justes

Ce titre est créé en 1963 par l'Etat d'Israël. Il honore des personnes non juives, qui ont risqué leur vie pour venir en aide à des Juifs, durant la seconde guerre mondiale. Leurs noms sont inscrits au Mémorial Yad Vashem à Jérusalem.

En France, les noms des personnes reconnues comme « Justes » sont gravés sur le « Mur des Justes » au Mémorial de la Shoah à Paris.

 Médaille des Justes

En janvier 2007, Jacques Chirac, Président de la République Française, rend un hommage solennel aux « Justes de France » (3074 à ce jour) et dévoile, dans la crypte du Panthéon, à Paris, une plaque où l'on peut lire : « ...Bravant les risques encourus, les Justes ont incarné l'honneur de la France, ses valeurs de justice, de tolérance et d'humanité »

À la libération

Les enfants cachés, orphelins pour certains, sont accueillis dans des maisons d'enfants juives ou non. Dans le cadre du regroupement famillial, des organismes divers s'efforcent de retrouver les familles des enfants. Certains d'entre eux sont adoptés par des familles en France ou à l'étranger.

Les organisations juives, avec le soutien financier du JOINT et plus tard de l'Etat français, ouvrent des maisons d'accueil. Pour ces enfants c'est un retour à la vie sans perte de leur identité juive. Des oeuvres laïques ou des orphelinats de l'Etat leur ont également donné une éducation et un métier.

Conclusion

En dépit de la collaboration active du régime du Maréchal Pétain avec les Nazis, la proportion d'enfants survivants, en France, est plus importante que dans la plupart des autres pays. On estime que 10 000 enfants sont sauvés par des réseaux juifs, 4 000 en zone nord et 6 000 en zone sud. 50 000 enfants sont sauvés, grâce à leurs parents ou à leur entourage.

Le concours d'oeuvres non-juives, laïques ou religieuses, les familles d'accueil citadines ou campagnardes, la mobilisation de ceux que l'on appelle maintenant « les Justes », expliquent l'efficacité d'un réseau. Ainsi sont mis à l'abri plusieurs milliers d'enfants, en France, sans compter ceux qui sont envoyés aux Etats-Unis, en Suisse ou en Palestine, via l'Espagne etc...

Les principales raisons du sauvetage important des enfants :

Lectures

Voici un choix de quelques ouvrages sur le sort et le sauvetage des enfants juifs en france, durant la guerre.

Films et documentaires

 

Sabine et Joseph, remercient très cordialement, tous les témoins et participants à cette soirée témoignages.